Interview du Prof. Sikora – Coordinateur du WP12

Le Prof. Axel Sikora, coordinateur du WP12
© NürnbergMesse / Thomas Geiger

Le projet ASIMUTE est un projet de recherche européen multidisciplinaire qui rassemble des femmes et des hommes d’horizons divers. Leurs parcours est différent mais toutes ces personnes sont engagées pour faire avancer la recherche. Découvrons qui ils sont ainsi que leurs motivations à travers une série de mini portraits.

Pour cette troisième interview, le Pr. Dr Axel Sikora, coordinateur du WP12, nous a accordé un peu de son temps pour répondre à nos questions.

Question 1 : Quel est votre parcours personnel ? Qu’est-ce qui vous a amené à embrasser une carrière scientifique ?

Prof. Sikora : Entamer une carrière académique n’était pas vraiment mon but à la fin de mon doctorat. En fait, j’avais un poste confortable au sein d’une entreprise pionnière de la fabrication de semiconducteurs lorsque je suis tombé sur une offre d’emploi pour un poste de professeur. Et, d’après moi, je correspondais à leurs attentes. C’est seulement après m’être replongé dans la recherche universitaire que j’ai compris que j’appréciais particulièrement l’indépendance de la recherche, la liberté de choisir des sujets passionnants sur lesquels travailler.
 
Question 2 : Pourquoi avez-vous choisi ce domaine de recherches en particulier ?
 
Prof. Sikora : La recherche sur l’Internet des objets (Intelligent Internet of Things) est un domaine extrêmement intéressant qui implique de travailler avec mais aussi sur des technologies de pointe très avancées qui amènent leur lot de questions et de défis. Toute découverte dans ce domaine ouvre le champ des possibles en termes d’opportunités et d’applications scientifiques. Et, par conséquent, le financement de telles recherches ne diminue pas.
 
Question 3 : Dans quelle mesure votre domaine de recherche est-il lié au projet ?
 
Prof. Sikora : Mon équipe et moi nous focalisons sur l’Internet des Objets, qui regroupe quatre axes de recherche : la sécurité, la transmission sans fil, la communication en temps réel et l’intelligence de pointe au sein d’un réseau. Dans le projet ASIMUTE, nous nous appliquons à définir des approches de sécurité pour des solutions de transmission d’information spécifiques aux boitiers intelligents.
Ivan Rigoev et le Prof. Dr.-Ing. Axel Sikora, les principaux contributeurs du WP12
Question 4 : Quelle(s) question(s) vous êtes-vous posé au début du projet ?
 
Prof. Sikora : Dans la continuité du projet précédent, le « Smart Meter Inclusif » (SMI), nous souhaitions étendre nos recherches sur la communication sécurisée des boitiers intelligents en y incluant des CLS (Controllable Local Systems), des compteurs divisionnaires ainsi que des solutions LPWAN (Low Power Wide Area Network) et continuer nos recherches sur la reconnaissance digitale à distance.
 
Au sein d’ASIMUTE, il y a trois questions principales, qui sont étroitement liées :
  • Quelles solutions technologiques sont utilisées dans la région trinationale France-Allemagne-Suisse ?
  • De quelle façons ces technologies et leurs composants sous-jacents peuvent-ils être attaqués ?
  • Comment pouvons-nous nous défendre contre ces attaques ?
Question 5 : À l’heure actuelle, avez-vous déjà trouvé des éléments de réponse ?
 
Prof. Sikora : Comme dans beaucoup de projets, les réponses arrivent l’une après l’autre, dans l’ordre des questions :
  • Nous avons compilé un large échantillon détaillé des technologies utilisées dans les 3 régions étudiées
  • Nous avons développé et simulé un grand nombre de vecteurs d’attaque sur les systèmes et leurs composants.
  • Nous sommes actuellement en phase d’analyse des résultats, qui nous permettront de concevoir des stratégies de défense.
Question 6 : Que pouvez-vous révéler de vos résultats sans nous en dire de trop ?
 
Prof. Sikora : Tout d’abord, parlons des technologies utilisées : les technologies et systèmes utilisés divergent grandement d’un pays à l’autre. C’est encore plus flagrant lorsque l’on compare la France et l’Allemagne – à cause des lois et des structures de marché qui sont très différentes. La Suisse, elle, est diversifiée et dispose de spécificités régionales, qui rassemblent des solutions en provenance d’Allemagne et d’autres pays.
 
En ce qui concerne les attaques, le projet précédent (SMI) a démontré que les systèmes restent stables lorsqu’ils sont sous pression. A notre grande surprise, nous n’avons trouvé aucune défaillance. Cependant, en ce qui concerne l’analyse des composants sous-jacents (les bibliothèques de sécurité, par exemple), nous avons décelé que notre approche d’empreintes digitales affichait des informations intéressantes.

L’équipe de l’Institut ivESK, qui se focalise sur le développement de solutions IoT connectées intelligentes et sécurisées

Question 7 : À partir de quel moment et pourquoi avez-vous commencé à travailler sur des projets liés à l’environnement ?
 
Prof. Sikora : Oh, ça fait bien des années maintenant. Trente ans pour être précis. L’observation environnementale, la gestion énergétique et les boitiers intelligents sont des éléments clés de l’Internet des Objets. Et ce sont des domaines sur lesquels je travaille depuis le début de ma carrière.
 
Question 8 : Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur les buts et/ou les résultats des projets environnementaux sur lesquels vous avez travaillé ?
 
Prof. Sikora : Grâce à l’Internet des Objets, absolument tout peut être connecté. Il existe donc plusieurs projets liés aux domaines de la surveillance et du contrôle de l’environnement auxquels nous avons participé dans le but d’aider nos partenaires dans la mise en place d’une connectivité efficace, sécurisée et stable pour leurs applications environnementales. En voici quelques exemples :
  • Nous avons développé un réseau maillé sans fil pour un fabricant d’appareils de prévention d’inondation. Notre collaboration lui a permis d’installer ses appareils à quelques kilomètres les uns des autres le long du Rhin. Chacun est équipé d’un senseur basse consommation abordable au lieu d’un modem cellulaire 5G énergivore et coûteux.
  • Nous avons choisi une approche similaire lors d’un projet très intéressant avec une université partenaire située à Lahore, au Pakistan. Cette dernière a créé un boitier au prix abordable qui permet de mesurer la pression de l’eau, l’a installé dans un système de distribution hydraulique pour les petits canaux d’irrigation dans le Punjab puis l’a connecté avec une autre solution de réseau maillé, d’un niveau d’optimisation supérieur.
  • Nous avons collaboré avec badenova et sa filiale providata sur le développement d’applications « smart city » pour Fribourg. Les deux entreprises avaient déjà installé un réseau LPWA (Low Power Wide Area) et nous les avons aidées dans la conception de nouveaux senseurs à destination d’appareils de mesure hydraulique et calorifique.
  • Nous avons aussi travaillé sur des projets incluant la surveillance des éléments dans une économie circulaire.
Installation d'un instrument de mesures sans fil extérieur dans le Punjab (Pakistan)

Il est clair que nous ne pouvons relever ces défis seulement si nous agissons ensemble, en travaillant efficacement, en partageant nos résultats, en avançant dans la même direction.

Question 9 : Pourquoi l’optimisation énergétique est-elle importante au niveau européen ?
 

Prof. Sikora : Et bien, il est évident que l’optimisation énergétique est importante. L’énergie est un sujet international, elle est donc essentielle. En Europe, nous sommes tellement interconnectés et interdépendants que nous devons prendre du recul pour avoir une vue d’ensemble. Malgré ça, nous observons des approches diverses. Parfois, les technologies utilisées n’ont rien en commun, parfois elles sont très similaires mais pas identiques. D’une certaine manière, ces technologies sont les différents dialectes d’une même langue.

Il est clair que nous ne pouvons relever ces défis seulement si nous agissons ensemble, en travaillant efficacement, en partageant nos résultats, en avançant dans la même direction. Nous avons encore énormément de travail devant nous !

Avec mon équipe, nous avons beaucoup de chance car, même si nous ne possédons qu’un statut universitaire, nous participons à la conception des mesures de sécurité générales des boitiers intelligents. Ainsi, nous espérons et sommes même persuadés que nos solutions ne finiront pas mises de côté, sur le coin d’un bureau. Elles seront étudiées et auront un impact réel sur notre quotidien.

 
Question 10 : Y-a-t-il des projets scientifiques qui suscitent votre engouement ?
 

Prof. Sikora : Il y a tellement de défis à relever. Et un grand nombre de solutions ont déjà vu le jour ! Je dois avouer que j’aime ce moment où on se retrouve tous ensemble autour d’une table et des personnes détaillent la solution qu’elles ont développée pour résoudre tel problème. A partir de ce point, on pense aux autres problèmes qui pourraient être résolus grâce à cette solution.

En fait, une grande partie du travail n’est pas d’inventer de nouvelles solutions mais de les utiliser de manière transversale, d’un problème à un autre, d’un domaine à un autre.

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